dimanche 1 mars 2009


La fuite hors du présent



Pendant des millénaires, l'homme a vécu au rythme cosmique de l'alternance du jour et de la nuit, des saisons, de la naissance, de la vie et de la mort. Les cycles du sommeil et du travail étaient réglés par les saisons. Le seul éclairage nocturne étaient la lueur de la bougie, de la lampe à huile ou du feu de cheminée.

Les inventions combinées de l'électricité et de l'ampoule électrique ont cassé ce rythme naturel en rallongeant les journées à volonté. Le téléphone, la radio, les transports motorisés ont profondément modifié le rapport de l'homme avec l'espace et le temps et cassé sa synchronisation millénaire avec le rythme du cosmos. On ne percoit pas en effet le monde de la meme manière à 130 km/h sur une autoroute qu'au cours d'une randonnée dans des sentiers de campagne ou de montagne.

L'activite humaine jadis quasi-immobile dans l'espace-temps d'une vie s'est convertie progressivement en une succession ininterrompue de déplacements à grande vitesse avec des horaires, des taches à accomplir et des échéances à respecter. Une course hystérique à la performance a remplacé la lenteur d'un mode de vie séculaire réglé par la nature.

En retour l'homme moderne a pu propulser en moins d'un siécle sa productivité et son confort matériel de vie à des niveaux jadis impensables. Mais cette appropriation du temps et l'espace est purement illusoire, car l'homme a changé sans s'en rendre compte de dimension temporelle en prenant l'habitude de se projeter en permanence dans un avenir où son emploi du temps ne cesse d'ajouter des taches à effectuer.

Le paradoxe est que plus on croit gagner du temps, plus on en perd. Car le seul temps de vie dont on est propriétaire est le présent. On peut toujours rever de lendemains qui chantent, mais la seule dimension réelle est le présent. Demain, nous serons peut etre morts. Le futur n'est qu'un reve eveillé où l'on projette ses désirs. Et pendant que l'on reve du futur on est aveugle au présent, à la communication avec les autres. Ainsi les gens pressés, les utopistes vivent dans un univers décalé qui les empechent de vivre la réalite du présent.

Le temps est la division de cycles naturels qui peuvent se schématiser par des cercles concentriques, le cycle de 24h, le cycle des saisons et de l'année, le cycle personnel de la vie, de la naissance à la mort. Le temps qui passe sans qu'on s'en rende compte ne compte pas, il est vide de conscience. Seul compte le temps qui dure, ces instants où l'on arrive à ralentir le cours du temps pour mieux le savourer. Le reste du temps nous échappe comme le sable entre les doigts. Il faudrait réapprendre à vivre à temps partiel dans le temps cosmique, dans son flux lent de rivière tranquille duquel on peut admirer les berges et le paysage des hommes. L'ame apaisée, l'homme peut alors entrer dans l'immobilité éternelle du temps cosmique, le présent mythique des sociétés primitives. Et retrouver la sérénité qu'il a perdu. Mais l'homme moderne a perdu cette relation au cosmos qui lui donnait le pouvoir d'arreter le temps, de ne plus voir en lui une pression,

Plus l'homme s'éloigne de cette capacité à arreter le temps, plus il se mue en un vulgaire robot programmé seulement pour réaliser des taches imposées par la société. Toute son attention, toute sa capacité de concentration sont tendues vers un seul but et l'empechent de vivre dans le présent. Apres on entendra des remarques: je n ai pas vu le temps passer, on a pas vu grandir les enfants et une sensation d'amertume de n'avoir pu profiter de la vie.

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