dimanche 1 mars 2009

L'angoisse

Il y a des jours où elle vous réveille avant l'aube, compagne fidèle, triste et envahissante des jours gris. Elle vous enlève l'envie de se lever, vous paralyse dans ses bras, dans la chaleur protectrice des draps. Elle vous recroqueville en position foetale comme pour éviter un coup fatal. Elle vous vole l'air de vos poumons au point que la poitrine se serre au bord de l'arrêt cardiaque. Si vous vous laisser aller, elle arrivera même a vous tirer des larmes. Vous avez un urgent désir que le temps s'arrête, que tout s'arrête, jusqu'à votre propre vie, pour échapper à ces griffes qui vous lacèrent le cerveau sans relâche. Angoisse si puissante qui dépasse toute logique, qui es tu pour nous mettre au tapis si facilement ?

L'angoisse est souvent l'expression confuse de peurs que des évènements du passé ont gravé pour toujours dans notre inconscient. De simple réaction épisodique à l'idée de l'éventualité d'une sanction, elle peut devenir résidente au point de se transformer en sentiment infectieux polluant notre personnalité. Pour la contrer, la solution de facilité est de voir le médecin traitant qui vous prescrira de petites pilules dont vous ne pourrez bientôt plus vous passer. L'angoisse deviendra plus supportable, remplacée par la mauvaise humeur ou la tristesse dans les moments difficiles ou par l'euphorie si un peu d'alcool atteint le sang.

La dépendance aux comprimés fera oublier la source du mal que seul un effort conscient soutenu pourrait tarir. L'angoisse se retrouvera alors confortablement installée insensible au rideau de fumée temporaire dégagé par l antidépresseur et prête à l'attaque au moindre vent favorable.

Dans ce cas là, il faudra passer la vitesse supérieure avec une psychothérapie souvent à double tranchant. D'un cote une tentative de compréhension et déconstruction du moteur de son angoisse propre et des pilules mieux ciblées qui vous enlèvent la force de faire l'effort de révolution nécessaire du mode de penser. Sans compter que le déreglage de l' usine chimique du cerveau qui influence nos humeurs peut parfois atteindre un niveau irréversible qui interdit l'arrêt des médicaments.

Mais quelle est donc cette source intarissable de l'angoisse qui affecte tant les gens dans nos sociétés dites développées ? L'angoisse est par définition une peur indéfinie, sans raison objective. Elle se nourrit d'une peur diffuse de l'avenir qui est par définition indéfini puisqu'à venir. Vivre en permanence en fonction d'un futur par essence imaginaire est une source majeure d'angoisse quand l' intellectualisation inconsciente, à défaut de modèle prédictif objectif, génère seulement des répliques de scénarios noirs du passé ou un sentiment d' impuissance face aux conduites exigées par le modèle sociétal dominant. Autant de clients pour les psychiatres, psychologues, tireurs de tarots, astrologues, gurus vendeurs d'espoir pour contrer l'angoisse de l'inconnu.

L'accélération du rythme de vie peuple sans arrêt notre présent d'échéances à respecter. On en arrive à vivre en permanence stressés par la pression du futur sans pouvoir profiter du présent. Totalement accaparés par l'imagination et la préparation du futur comme un étudiant préparant des examens. Et avec parfois ou souvent la peur sourde de tout rater ou l'envie de tout lâcher.

Les plus efficaces et non les moins angoissés traverseront ainsi la vie à 200 à l'heure, accumulant les richesses matérielles sans jamais pouvoir profiter du paysage du présent. D'autres vivront leur vie plus lentement dans la peur du chômage et du manque d'argent. Ils se syndiqueront et achèteront des billets de la Loterie Nationale.

La vie ne peut se vivre que dans le présent. Le passé est un souvenir et le futur le seul produit de l'imagination. Le seul espace réel où se joue notre bonheur est l'instant présent. Seule cette prise de conscience et son application peuvent nous recaler avec le tic tac de l'horloge qui égrène notre vie et nous permettre de refaire surface dans le présent. Peu importe qu'il soit bon ou mauvais, le présent est une réalité qui ne peut être changée. Par contre il est possible de changer sa perception du présent, de profiter mieux du bon et de relativiser le mauvais. Se recentrer ainsi dans le temps a toujours été un des objectifs de la philosophie pour échapper aux angoisses superflues de l'existence et retrouver la tranquillité de l'esprit.

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